Mes contributions externes

Il m’arrive de publier des articles, chroniques, critiques sur le site artsixMic et vous invite à les découvrir ou redécouvrir ici. Livres, films, expos et autres événements, tout est répertorié ci-dessous. Il vous suffit de cliquer sur le titre des articles pour être redirigé vers le site.

The School of Life

The School of Life

Comment améliorer sa confiance en soi, comment trouver le job de ses rêves, comment faire durer l’amour, comment booster sa créativité ou encore comment avoir de meilleures conversations… autant de questions auxquelles The School of Life se propose de répondre.

The School of Life c’est ce concept importé de Londres basé sur le développement de soi. En clair, cette « école de la vie » fait la promesse d’apporter des réponses à toutes ces questions que l’école, « la vraie », n’a jamais abordé de façon concrète.

Le concept a donc traversé la Manche depuis quelques mois déjà et fait salle comble à chaque cours du soir proposé entre 19h et 22h. C’est poussée par la curiosité et surtout par l’entrain avec lequel une amie me parle de « ces classes » auxquelles elle assiste de façon assidue, que j’ai décidé de réserver ma place pour assister au dernier cours de ce premier trimestre qui portait sur l’amélioration des conversations.

Dès mon arrivée, je suis accueillie par la directrice de l’école, Fanny, qui dispense également le cours de ce soir. Elle m’invite à me débarrasser de mes affaires, à me servir quelque chose à boire et à manger parmi le buffet proposé. L’accueil est réussi et je commence à papoter avec une dame assistant, elle aussi, à son tout premier cours. Basée sur des banalités, la conversation n’est pas forcément très riche mais nous comptons bien sur le cours de ce soir pour améliorer tout cela !

Le lieu est agréable, épuré et accueillant. Parmi les élèves, des trentenaires surtout, mais des quadra également, une majorité de femmes mais aussi une bonne poignée d’hommes. Voilà que la cloche retentit : c’est l’heure de l’école !

Nous prenons donc place sur les chaises disposées en 3 rangées (nous sommes trente élèves) face à la prof qui nous invite à un tour de table où nous devons nous présenter par notre prénom et par un adjectif qui qualifie notre état d’esprit. Déjà les personnalités se détachent. A ma droite une très grande timide qui m’avouera plus tard lors d’un « exercice » attendre de ce cours qu’il participe à l’émanciper et à la sortir de cette timidité maladive. Juste devant moi, une quinqua haute en couleur montre qu’elle n’a aucun mal à prendre la parole en public et précisera plus tard qu’elle cherche à « cadrer ses prises de parole ». Je réalise donc que « chacun cherche son chat » dans ce cours, que chacun a des réponses / anecdotes personnelles à partager, ce qui favorise l’échange et vient enrichir le cours.

Car si ce cours est cadré par les slides présentées par Fanny, c’est bel et bien l’échange et les exercices en binôme ou groupe de 3 ou 4 qui rythment la séance. Un bon mix de théorie et de pratique est ainsi proposé avec des extraits de films, des lectures qui viennent aussi bien citer quelques philosophes, professionnels du langage tels que Théodore Zeldin ou encore Daniel Godo, des poètes, et puis aussi Jacques Brel, Tarantino, Sex and the city ou les Monthy Python : le tout étant de montrer que la conversation est au cœur de notre quotidien et qu’elle se présente sous diverses formes.

Si je n’ai pas vu les trois heures passer, je me suis demandé si ce cours m’avait véritablement appris quelque chose. La réponse n’est pas limpide mais à l’heure du debrief, j’ai la certitude que j’en ai tiré des billes intéressantes. Elles me permettront à l’avenir d’appréhender différemment les conversations que je pourrai avoir notamment avec des gens que je ne connais pas. Car définitivement, ce cours m’a rappelé à quel point l’échange est à la base de tout : il nous définit nous-même et marque notre ancrage au monde. Et dit comme cela, ça peut sembler très théorique mais je vous assure que c’est en fait concret. A l’image de ce cours dispensé par The School of Life. Vivement la rentrée ! Barbara Govaerts pour artsixMic

The School of Life Paris
28 Rue Pétrelle
75009 Paris

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Run, The Homesman, Respire en course à Cannes

Run, The Homesman, Respire en course à Cannes

Voilà que le Festival bat son plein. Un soleil radieux s’expose sur toute la croisette pour le plus grand plaisir des festivaliers et des touristes / locaux venus profiter de la douceur de vivre de « Cannes 2014 ». Le rythme frénétique des séances qui s’enchaînent est à son apogée, pour mon plus grand plaisir, et je viens vous parler ici des quatre derniers films visionnés avant mon retour à Paris. C’est en effet depuis le train que je vous écris ces lignes. Retour donc sur la suite et fin de cette belle aventure et parenthèse cannoise.

Je vous ai donc laissé hier en bonne compagnie, avec le beau souvenir d’Yves Saint Laurent, bel et bien revenu à la vie sous l’œil de Bertrand Bonello, cinéaste précis, rigoureux et artiste.

La suite de cette journée fut « peuplée » de déceptions cinématographiques sans pour autant pouvoir affirmer qu’il s’agissait là de films ratés. Mon but n’est en aucun cas de « brosser quiconque dans le sens du poil » mais force est de constater que la sélection proposée regorge de films de qualités, soignés. Si j’ai été déçue donc par quelques films, je dirais qu’il s’agit donc plus d’une question de goûts personnels et de subjectivité.

J’ai donc vu Run, présenté dans le cadre d’Un Certain Regard. Ce film ivoirien évoque le parcours de Run, un jeune homme surnommé ainsi pour avoir du s’enfuir à maintes reprises au cours de sa vie. Ce film évoque la construction d’un homme à la recherche de sa stabilité aussi bien morale que physique. Ce film réalisé par un jeune réalisateur ivoirien a pour but de montrer la réalité d’un pays gouverné par la terreur et le conservatisme. Le film joue sur divers codes au travers d’une sorte de flash back qui revient au point de départ pour nous expliquer le parcours du personnage principal, recherché pour avoir tué le premier ministre. L’idée est assez intéressante mais n’a jamais vraiment réussi à m’emporter.

Il en va de même pour Les merveilles, film italien présenté en compétition officielle réalisé par une toute jeune première. L’histoire évoque la vie d’une famille d’apiculteurs sans le sous vivant dans une ferme excentrée de la ville. Le pseudo équilibre familial va se briser en miettes lorsque l’ainée de la famille va inscrire sa tribu à une émission de télé présentée par Monica Bellucci (dans les grandes lignes !). Mis à part quelques – trop courts – moments de grâce, je dois vous avouer que je ne suis jamais entrée dans cette histoire non plus. A aucun moment je n’ai été touchée ou même concernée par le sort de cette famille. Le rythme est bien trop lent à mon goût pour, au final, ne pas découler sur un final grandiloquent. Je me suis perdue en route en fait. Je serai curieuse de lire les avis sur ce film afin de voir si d’autres ont eu, eux, une belle récolte !

Ce dimanche fut tout autre ! Même si l’heure matinale des projections presse (8h30) commençait à avoir raison de ma bonne forme physique (j’en rajoute ne vous en faites donc pas) c’est avec un enthousiasme certain que je me suis rendue à celle du western de Tommy Lee Jones (TLJ) présenté en compétition officielle. The homesman, c’est le titre du film, est une ode féministe qui évoque le courage, l’endurance et la volonté des femmes.

Les westerns, ce n’est pas ma tasse de thé mais TLJ, je ne sais trop pour quelle raison, mais il me touche. Il me parle. Je sens qu’il a des choses à nous dire sur l’humain. Je ne me trompais pas, il le prouve ici avec ce second film (5 ans après Trois enterrements).

Le film raconte l’histoire de Mary Bee Cudy (décidemment sublime Hilary Swank), institutrice du village désignée volontaire pour accompagner trois femmes ayant perdu la raison pour diverses raisons familiales, auprès d’un pasteur méthodiste qui pourrait les soigner. La route est longue sur les terres de l’ouest américain, longue et dangereuse – d’autant plus pour une femme aussi caractérielle et « rude » puisse t-elle être. C’est la raison pour laquelle Mary Bee va offrir à ce George, (TLJ himself) repris de justice condamné à mort, la possibilité de l’accompagner contre récompense financière.

S’en suit donc cette longue route qui leur offrira, à chacun, la possibilité de se dévoiler, de se connaître, de s’apprécier. TLJ est excellent et touchant en bougre bougon mais l’important n’est pas là.

Il offre à Hilary Swank un magnifique rôle de femme à contre temps de sa société (célibataire à 31 ans Oh mon Dieu !). Une femme rendue forte et dure par la difficulté de son statut social et par la vie, impitoyable et « morne » sur ces terres de l’ouest américain. La musique est sublime et m’a tiré quelques larmes dès la première minute du générique, les paysages sont, vous l’imaginez, incroyables de force et fragilité à la fois : n’importe qui peut surgir de cet horizon incertain. Une belle, très belle, métaphore de la vie et du courage. Il semble donc que j’avais vu juste : la femme occupe une place centrale dans cette sélection cannoise.

Mélanie Laurent, présente à la semaine de la critique pour projeter son second film Respire n’est pas là pour nous contredire. Elle réussit le pari de filmer la fin de l’adolescence (17-18 ans) avec brio. Son film raconte l’histoire d’une amitié toxique et anéantissante. Sans vous dévoiler le dénouement bien évidemment, j’aurais préféré à cette fin tragique, un rebondissement plus positif. Comprenez, j’aurais aimé que les deux jeunes femmes parviennent à un équilibre au sein de cette amitié et s’en trouvent enrichies. Mais je ne suis pas là pour refaire l’histoire et je vous dirai donc simplement la douceur et la puissance avec laquelle Mélanie Laurent filme ses jeunes actrices. Elle parvient à trouver le point juste pour évoquer cette difficile période qu’est l’adolescence, seuil d’un manque de repères parfois, et de confiance en soi, toujours. Le film trouve sa force dans la qualité du traitement de son propos. L’amitié, à tout âge de la vie bien évidemment, mais particulièrement, je pense, à l’adolescence, est un des piliers de la construction de l’adule que l’on est en passe de devenir. L’amitié est primordiale et joue un rôle clé dans ce que l’on pourrait qualifier de « modèle » ou miroir ou encore « double ». En ce sens, l’amitié participe grandement de la construction de l’individu. Et cela, Mélanie le filme sacrément bien.

RUN

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

RUN

Date de sortie : 12/12/2014

Run s’enfuit… Il vient de tuer le Premier ministre de son pays. Pour cela il a dû prendre le visage et les vêtements d’un fou, errant à travers la ville. Sa vie lui revient par flashes; son enfance avec maître Tourou quand il rêvait de devenir faiseur de pluie, ses aventures avec Gladys la mangeuse et son passé de milicien en tant que Jeune Patriote, au coeur du conflit politique et militaire en Côte d’Ivoire. Toutes ses vies, Run ne les a pas choisies. A chaque fois, il est tombé dedans en s’enfuyant d’une ancienne vie. C’est pour ça qu’il s’appelle Run.

Réalisé par Philippe Lacôte Avec Abdoul Karim Konaté, Isaach de Bankolé, Rasmane Ouedraogo

THE HOMESMAN

Date de sortie : 21/05/2014

En 1855, trois femmes ayant perdu la raison sont chassées de leur village, et confiées à Mary Bee Cuddy, une pionnière forte et indépendante originaire du Nebraska. Sur sa route vers l’Iowa, là où ces femmes pourront trouver refuge, elle croise le chemin de Georges Biggs, un rustre vagabond qu’elle sauve d’une mort imminente. Ils décident de s’associer afin de faire face, ensemble, à la rudesse et aux dangers qui sévissent dans les vastes étendues de la Frontière.

Réalisé par Tommy Lee Jones Avec Tommy Lee Jones, Hilary Swank, Meryl Streep

RESPIRE

Sortie le 12 Novembre 2014

Charlie, une jeune fille de 17 ans. L’âge des potes, des émois, des convictions, des passions. Sarah, c’est la nouvelle. Belle, culottée, un parcours, un tempérament. La star immédiate, en somme. Sarah choisit Charlie.

Réalisatrice : Mélanie Laurent Actrices : Lou de Laâge, Joséphine Japy, Isabelle Carré, Claire Keim Production déléguée : Move Movie Genres : Fiction Voir aussi sur artsixmic : Les premières pépites de Cannes 2014

Et c’est ici que s’achève mon périple cannois. C’est avec un plaisir réel que j’ai partagé avec vous mon humble avis sur les films projetés cette première semaine. La compétition se poursuit la semaine prochaine, je ne manquerai pas de suivre cela de très près. Restez connecté si vous voulez tout savoir de Cannes 2014 !

Barbara Govaerts à Cannes pour artsixmic

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Les premières pépites de Cannes 2014

Les premières pépites de Cannes 2014

Ca y’est la pépites sont de sortie à Cannes ! Les pépites de la compétition officielle j’entends car si vous me suivez depuis le début de cette aventure, vous aurez déjà noté mes divers coups de cœur pour les films présentés dans les sélections parallèles (Bande de filles à la Quinzaine et Party Girl à Un Certain Regard).

J’ai vu hier soir Relatos Salvajes, un film argentin de Damian Szifron dont je ne connais rien, je dois l’avouer. C’est donc sans attente particulière que je suis entrée dans la salle et je peux vous dire que je suis restée jusqu’à la dernière seconde du générique de fin tant j’ai aimé ce film au point d’en vouloir encore plus. Il s’agit là d’un film à sketches qui évoquent tour à tour les tourments, les vices, les manquements de notre société.

Le second degré est de rigueur, tout comme l’humour noire et j’ai adoré !

Il est ainsi question d’un homme victime de maladie mentale souhaitant régler ses comptes avec son entourage, dans les airs, d’un règlement de comptes à la mort au rats dans un routier miteux, d’un homme qui perd les pédales après que sa voiture ait été emportée à la fourrière, d’une course poursuite en voiture entre deux hommes dont on soupçonne qu’il s’agisse là d’un « crime passionnel » ( un de mes préférés personnellement), de corruption policière et d’une fête de mariage qui tourne mal (l’apothéose de cette petite merveille cinématographique !)

Ces diverses histoires toutes décorrelées les unes des autres et viennent toucher du doigt les failles d’une société basée sur la corruption, le dédain et l’appât du gain. Elles évoquent également le déclin d’idéaux tels que l’honnêteté, l’entraide, la confiance et ce, sur un ton toujours léger qui apporte de la légèreté au propos. Le message passe tout aussi bien et nous ravi du rire par lequel nous sommes emportés. Cela faisait longtemps que je n’avais pas autant ri au cinéma et c’est franchement plaisant. Ce n’est pas mon voisin de siège qui me dira le contraire, pour le coup, je n’avais pas entendu ni vu un tel fou rire depuis des lustres. Voilà du cinéma qui remue.

La suite du programme ne fut autre que le Saint Laurent de Bonello. Attendu et questionné tant l’accent fut mis sur « l’autre » Yves Saint Laurent (de Jalil Lespert) adoubé par Pierre Bergé. Cet opus était réussi à mon sens, j’avais aimé, été touchée par l’histoire d’amour qui fut la leur. Ici le propos est tout autre. Bien évidemment il est question des mêmes personnes, du même environnement mais le focus est différent.

Le réalisateur s’attarde sur les années sombres d’YSL (67-76 particulièrement) et met l’accent sur le processus de création – en ce sens, même si l’autre film utilisait les vrais modèles authentiques, ce Saint Laurent évoque plus en profondeur le travail des couturières, des « petites mains » sans qui le géni d’YSL n’aurait pu autant retentir.

D’autre part, cette version évoque la part d’ombre de ce créateur de géni (au sens fort) que fut YSL, ses folles soirées, ses rencontres toxiques (Jacques de Bascher, joué par un Louis Garrel toujours aussi fort et sensible) qui l’entrainèrent dans les baffons de la drogue et de la dépendance. Je pense comprendre la raison pour laquelle Pierre Bergé n’a pas donné son accord pour ce film (mais cela était-il nécessaire d’ailleurs ?) Il est ici quelque peu malmené et présenté comme celui qu’il fut et qu’il est toujours : le maître de l’empire YSL. Lui seul était capable de fonder cet empire et sans lui, YSL n’aurait pas eu le renommée qui fut la sienne, c’est certain. Il fut le roc d’un Yves enfantin et incapable de s’auto gérer. Cela dit, il m’a semblé ressentir un coté légèrement condescendant émanant de cet homme de pouvoir qui, s’il comprenait le business, n’entendait pas grand chose de l’art, sauf pour en faire une collection. Ce qui n’est pas moins noble, ne me faites pas dire ce que je n’ai pas dit !

Cette version faite de flashbacks et de flashforwards montre plus que jamais, à la fois, la perte et le manque de repère d’un homme qui ne fut jamais réellement ancré dans la société et dans la vie – une fois encore c’est un géni au sens fort du terme, un homme uniquement capable de son art.

Si le film se perd parfois dans des longueurs, cela est sans doute voulu comme pour nous donner l’impression de nous situer dans l’esprit du Maître, de cet homme étourdissant et étourdi par son géni. Et que dire de cette scène finale parfaitement maitrisée ? Le jeu est grand, la force de signification est à son comble.

Bonello dont je garde le meilleur souvenir de son Apollonide, est un maître de la suggestion et de l’impression – de la musique et de l’ambiance aussi. Il glisse son Saint Laurent dans une ambiance soul délicieuse et entrainante. C’est franchement réussi.

Gaspard Ulliel est épatant, tout comme l’était Pierre Niney je dois dire. Ils ont chacun percé le mystère de cet homme complexe sans pour autant chercher à le singer. La ressemblance se fait seule, avec l’imprégnation du personnage. C’est brillant et touchant. Il fut clairement l’homme qui a tant aimé les femmes.  Barbara Govaerts à Cannes pour artsixmic

Relatos Salvajes

Réalisé par Damián Szifron

Avec Ricardo Darín, Oscar Martinez, Leonardo Sbaraglia

SAINT LAURENT

Date de sortie : 17/10/2014

Un biopic centré sur la période 1965-76 de la vie du célèbre styliste.

Réalisé par Bertrand Bonello

Avec Gaspard Ulliel, Jérémie Renier, Léa Seydoux

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Captives, la Chambre Bleue 2 polars stylisés en compétition

Captives, la Chambre Bleue 2 polars stylisés en compétition

Les découvertes se poursuivent sur la croisette cannoise. Au programme de la matinée deux films : l’un canadien et l’autre français que l’on pourrait rapprocher par leur côté polar stylisé. Captives, en compétition officielle, évoque le difficile sujet de la pédophilie et des ravages d’internet. Ce film d’Atom Egoyan a su retenir mon attention et mon souffle, un bon début donc. Il s’en dégage une atmosphère pesante et lourde à l’image de cette neige qui ne cessera de tomber tout le film durant (l’histoire se déroule quelque part au fin fond du Canada). Cassandra s’est faite enlever en l’espace d’un instant sans que son père n’ai eu le temps de voir quoi que ce soit. Cassandra a alors 10 ans et cet instant précis marque le début d’une vie de souffrances. La vie de cette famille s’arrête.

Une série de flashbacks bien ficelée nous permet alors de remonter le cours de l’histoire.C’est haletant et bien amené. L’ambiance tendue, indispensable à tout bon polar, est clairement ressentie. L’enquête, semblable à un puzzle, nous plonge dans les méandres de cette famille en proie à la peur et au doute épaulée tant bien que mal par l’équipe de spécialistes mise en place (policiers etc). L’autre point fort de ce film n’est autre que cet acteur Ryan Reynolds, sans doute l’acteur US que je détestais le plus dans ce panel de pseudo « beaux gosses » made in Hollywood. Il s’avère que, bien dirigé, il est capable d’un jeu maitrisé, assez en retenue. Une belle découverte donc.

Cela dit, il manque un petit quelque chose pour faire de ce film une vraie réussite. On sent le perfectionnisme du réalisateur, sa connaissance du métier, sa passion également, sans pour autant que cela réussisse vraiment à décoller. Un pur polar stylisé donc mais sans éclat.

La chambre bleueJe ne dirais pas la même chose de la nouvelle réalisation de Mathieu Amalric. Sa chambre bleue adaptée de l’œuvre de Simenon est un petit « bijou polarisé ». La stylisation du film est complètement maitrisée : l’image « carré » donne tout son charme à la réalisation, la luminosité, la tension, la retenue de Léa Drucker (l’épouse) face à la fougue de l’amante… la charisme d’Amalric (qui prouve qu’il est définitivement un sublime acteur ET réalisateur). Au gré de l’avancement de l’enquête, l’on se retrouve encore plus face à la passion qui unit ses deux amants et c’est fort, très puissant mais léger en même temps. J’aime le ton qu’Amalric a choisi d’employer. Il évoque à la fois la souplesse de l’amour et la rigidité de ses lois. Les personnages sont fouillés et tout à fait crédibles et la mise en scène donne un angle de vue intéressant qui nous permet, à nous spectateurs, de ressentir l’envers du décor de cet amour passionnel et de ses conséquences. Amalric réalise ici un film court, à la fois tout à fait classique dans sa forme mais « rock » dans sa mise en scène et dans le propos qu’il défend. L’amour, le vrai, le fou se doit d’être vécu. J’adhère totalement. Une pure merveille.

Thierry Frémaux avait donc vu juste en présentant la sélection d’Un Certain Regard comme étant une « contre-programmation de la sélection officielle ». Elle présente, en tout cas à ce jour, une œuvre diversifiée, moderne, criante de vérité et franchement maîtrisée.

Cannes nous révèle clairement de belles surprises comme celle qui fut d’assister au live de l’émission de Daniela Lumbroso sur France bleu, assise sur un transat au soleil tranquilou avec quels invités ? Je vous le donne en mille Mathieu Amalric et Léa Drucker venus pour la promo de cette Chambre bleue… La boucle est bouclée ! Voici quelques photos en exclusivité pour vous.  Barbara Govaerts à Cannes pour artsixmic

CAPTIVES
Date de sortie : 14/05/2014

8 ans après la disparition de Cassandra, quelques indices troublant semblent indiquer qu’elle est toujours vivante. La police, ses parents et Cassandra elle-même, vont essayer d’élucider le mystère de sa disparition.

Réalisé par Atom Egoyan
Avec Ryan Reynolds, Scott Speedman, Rosario Dawson

LA CHAMBRE BLEUE
Date de sortie : 16/05/2014

Dis- moi Julien, si je devenais libre, tu te rendrais libre aussi ?
– Tu dis ?…
Un homme et une femme s’aiment en secret dans une chambre, se désirent, se veulent, se mordent même. Puis s’échangent quelques mots anodins après l’amour. Du moins l’homme semble le croire. Car aujourd’hui arrêté, face aux questions des gendarmes et du juge d’instruction, Julien cherche les mots. « La vie est différente quand on la vit et quand on l’épluche après-coup. » Que s’est-il passé, de quel crime est-il accusé ?…

Réalisé par Mathieu Amalric
Avec Mathieu Amalric, Léa Drucker, Stéphanie Cléau

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Les femmes et le cinéma au Festival de Cannes

Les femmes et le cinéma au Festival de Cannes

Le rythme s’accélère en ce deuxième jour de festival. Le rythme s’accélère et les émois restent les mêmes. Au programme de la journée un second biopic (après celui, raté, sur Grace de Monaco) et le film d’ouverture de la sélection parallèle Un Certain Regard (applaudi par la presse, c’est assez rare pour être noté !)

M. TurnerCe biopic dont je vous parle ici n’est autre que Mr Turner qui retrace un pan de la vie du célèbre peintre William Turner, ancêtre de l’impressionnisme. Bien que long (2h30) et parfois longuet, ce film offre un portrait sans fard de cet artiste à la fois tourmenté, dépressif et passionné.

Derrière ce petit grognement parfois lourd (censé évoquer le côté « bougre et bougon » de l’artiste), l’acteur Timothy Spall se révèle à la fois doux et sensible derrière des traits quelque peu disgracieux. A l’image de sa peinture d’ailleurs, teintée de la lumière du levant ou du couchant, qu’il met en peinture entre deux crachats et postillons destinés, sans doute, à diluer les poudres de couleur… chacun sa méthode. La sienne lui offre un bon train de vie sous l’égide (si je puis dire) du gouvernement anglais de l’époque.

Ce portrait évoque également un homme bon et humain (sauf avec sa femme et ses filles dont il ne se sent aucunement lié) concerné par les horreurs de son époque. C’est ainsi qu’il peindra ces bateaux négriers à l’origine d’atrocités humaines évoquant les rigueurs de son siècle.

Tout cela est plaisant quoique bien trop classique. Mêler cinéma et peinture n’est pas chose aisée. Bonello l’avait parfaitement fait avec son Appolonide, sans évoquer directement la peinture d’ailleurs et le résultat, beaucoup plus « rock » apportait un point de vue, un engagement sur le sujet qu’il évoquait, ce qui n’est pas le cas ici à mon sens.

On quitte la vie de cet homme comme on quitte le film, sans vraiment se dire qu’ils nous manqueront. La beauté ne fait pas tout, les mots ne font pas tout… tout est question de la façon dont on traite cette beauté.

Au final, les tableaux du maître Turner sont bien plus emprunts de fougue, de douceur et de poésie que ce biopic qui nous laisse avec la sensation d’avoir feuilleté toute l’encyclopédie de la bibliothèque sans pour autant nous avoir donné la possibilité de nous envoler.

Le second film de la journée n’est autre que Party girl. Un film que l’on pourrait inclure dans la catégorie du « cinéma social ». Une catégorie que j’apprécie tout particulièrement tant il permet de dévoiler et de regarder la vie.La vie telle qu’elle est sans fioriture et sans faux semblant.

C’est le cas de cette femme, Angélique. La soixantaine (assez) resplendissante, quasi retraitée de la danse et du striptease. Cette femme et mère de quatre enfants semble porter sur les épaules le poids d’une vie passée à faire rêver les hommes sans jamais avoir, elle, pu se laisser aller à la rêverie. Oui je pense qu’il est question de rêve ici – c’est d’ailleurs ce qu’elle parvient à exprimer à l’un de ses fils dans la voiture la veille de ses noces. Elle s’octroie le droit de rêver ne serait-ce qu’un instant.

Si Cannes est chaque année le lieu de moult débats sur la place des femmes dans l’industrie du cinéma (la présence de Jane Campion, unique réalisatrice à avoir remporté la Palme d’Or, en tant que Présidente du Jury est l’occasion d’évoquer à nouveau le sujet) cette sélection (officielle et parallèle) vient en tout cas prouver que le cinéma réserve une place de choix aux femmes en les montrant telles quelles sont : à la fois douces et persévérantes, fortes et vacillantes mais toujours, toujours maîtres de leurs choix (Grace de Monaco dans ce biopic même raté, les femmes, toutes les femmes, du film de Sissako, les femmes du monde de Turner et cette Angélique). Ce n’est sans doute pas la bande de filles de Céline Sciamma (Tomboy…) que je m’apprête à rencontrer ce soir pour l’ouverture de La Quinzaine, qui me diront le contraire… Barbara Govaerts à Cannes pour artsixmic

PARTY GIRL

Angélique a soixante ans. Elle aime encore la fête, elle aime encore les hommes. La nuit, pour gagner sa vie, elle les fait boire dans un cabaret à la frontière allemande. Avec le temps, les clients se font plus rares. Mais Michel, son habitué, est toujours amoureux d’elle. Un jour, il lui propose de l’épouser.

Réalisé par Marie Amachoukeli, Claire Burger et Samuel Theis. Avec Angélique Litzenburger, Joseph Bour, Mario Theis. En salle en décembre 2014

MR. TURNER

Un biopic du peintre britannique J.M.W. Turner.

Réalisé par Mike Leigh. Avec Timothy Spall, Roger Ashton-Griffiths, Jamie Thomas King.  En salle en décembre 2014

Voir aussi sur artsixmic : Barbara Govaerts : Cannes c’est reparti !

Barbara Govaerts : Cannes c’est reparti !

Barbara Govaerts : Cannes c’est reparti !

Cannes c’est donc parti ! Son Festival, sa compétition, ses stars…  Et c’est sous le soleil que débute ce 67ème opus qui vise à rassembler tous les amoureux du cinéma du monde entier. Oui vraiment, le Monde est là et c’est avec un plaisir non dissimulé que je redécouvre les moindres recoins de ce Palais, de ces salles, de cette ambiance animée.

Le Festival de Cannes aime la presse, quelques 4500 journalistes vont, en effet, se presser dans les salles afin d’assister aux diverses projections de la compétition et des sélections parallèles. Le film du jour n’était autre que le film d’ouverture Grace de Monaco réalisé par Olivier Dahan (La Môme), qui d’ailleurs, sort en salle simultanément.

La première projection est source d’une émotion particulière. La magie opère à nouveau, le plaisir de retrouver ce haut lieu du cinéma mondial… Les attentes sont grandes et le plaisir est partagé. Clairement, le cinéma unit et réunit au même titre qu’il a pour but de faire parler, de délier les langues, de créer des polémiques (parfois), des débats (souvent).

Débat il semble y avoir sur ce film qui retrace donc un pan de la vie de Grace de Monaco. Disons le tout de go, je ne suis pas une grande fan de ce cinéma là. Les grandes fresques romanesques avec soupçon de drame… très peu pour moi.

Le film est tout à fait l’image que je m’en faisais. C’est une fresque romanesque avec moult envolées lyriques qui ne creuse aucun des thèmes abordés. Il s’agit là d’un assez joli portrait de femme, certes. Il évoque les choix d’une femme qui doit trouver sa place entre son rôle d’épouse, de mère, de Princesse, et d’actrice… Oui d’accord, c’est là d’ailleurs l’enjeu de bon nombres de femmes dans le monde. Avec ce film, il me semble qu’Olivier Dahan confond le fait d’évoquer un sujet avec le fait de traiter un sujet. Tout sonne creux ici. Le film nous offre une sacrée exagération de gros plans : ce n’est pas pour autant que l’on « entre » plus facilement dans le film ni dans le cœur des personnages d’ailleurs.

C’est bien simple, rien ne m’a touchée mis à part La Callas… ah La Callas, elle apporte du frisson et ce supplément d’âme dans les moindres recoins de glace. Grace de Monaco, aura donc donné le La de ce 67ème Festival de Cannes mais ne marquera pas les anales du cinéma international et ce, avec ou sans l’approbation de la famille princière de Monaco, j’en fais le pari.

Timbucku d’Abderrahmane Sissako

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La musique joue un rôle important dans le second film de la journée. Timbuktu d’Abderrahmane Sissako, premier film de la compétition officielle. Ce film, majestueux lui, évoque la dangerosité des extrémismes religieux et ce, sur un ton juste et sobre. Voilà tout ce que l’on peut demander au cinéma mondial.

Timbuktu d’Abderrahmane Sissako, bien que parfois décousu, ce film montre les dérives d’un monde qui va à reculons. Là ou le rire, la couleur, le chant, la danse , le sport… régnaient en maitres, se trouvent désormais la peur, la haine, la lapidation, les coups de fouets imposés par quelques islamistes incultes. Sujet épineux et douloureux qui semble résonner dans la tête de tous : comment ce monde si évolué peut-il soudain revenir si bas. Sissako pose la question de la montée des extrêmes, question là encore, parlante et épineuse pour bien des pays et bien des cultures. Alors que le soleil s’est couché sur la Croisette et sur le Palais des festivals depuis quelques heures maintenant, il est clair que cette première journée fût riche de nouveautés, de découvertes et de sensations fortes. Le cinéma nous parle, encore et toujours. Il résonne dans nos actualités, dans les sujets de nos sociétés. Le cinéma est bel et bien ce langage universel dont nous avons tant besoin. Barbara Govaerts à Cannes pour artsixmic

TIMBUKTU

Réalisé par Abderrahmane Sissako – Avec Abel Jafri, Pino Desperado, Hichem Yacoubi – En décembre dans les salles

Non loin de Tombouctou tombée sous le joug des extrémistes religieux, Kidane mène une vie simple et paisible dans les dunes, entouré de sa femme Satima, sa fille Toya et de Issan, son petit berger âgé de 12 ans.En ville, les habitants subissent, impuissants, le régime de terreur des djihadistes qui ont pris en otage leur foi. Fini la musique et les rires, les cigarettes et même le football… Les femmes sont devenues des ombres qui tentent de résister avec dignité. Des tribunaux improvisés rendent chaque jour leurs sentences absurdes et tragiques. Kidane et les siens semblent un temps épargnés par le chaos de Tombouctou. Mais leur destin bascule le jour où Kidane tue accidentellement Amadou le pêcheur qui s’en est pris à GPS, sa vache préférée. Il doit alors faire face aux nouvelles lois de ces occupants venus d’ailleurs…

GRACE DE MONACO « Bande Annonce » 

Grace de Monaco

Lorsqu’elle épouse le Prince Rainier en 1956, Grace Kelly est alors une immense star de cinéma, promise à une carrière extraordinaire. Six ans plus tard, alors que son couple rencontre de sérieuses difficultés, Alfred Hitchcock lui propose de revenir à Hollywood, pour incarner Marnie dans son prochain film. Mais c’est aussi le moment ou la France menace d’annexer Monaco, ce petit pays dont elle est maintenant la Princesse. Grace est déchirée. Il lui faudra choisir entre la flamme artistique qui la consume encore ou devenir définitivement : Son Altesse Sérénissime, la Princesse Grace de Monaco.

Réalisé par Olivier Dahan – Avec Nicole Kidman, Tim Roth, Frank Langella

Cannes, s’apprête à accueillir son 67ème Festival de Cannes

Cannes, s'apprête à accueillir son 67ème Festival de Cannes

Cannes, comme chaque année, s’apprête à accueillir son Festival : haut lieu du cinéma mondial. Véritable antre du glamour, de la mode, du luxe et du cinéma, ce Festival est le temps fort annuel du septième art. C’est avec un plaisir non dissimulé qui fit suite à une longue attente que nous avons découvert cette semaine la sélection officielle de ce 67ème Festival de Cannes.

Nous retenons surtout l’arrivée en trombe dans la sélection officielle du jeune génie capricieux Xavier Dolan, le retour de Godard avec un film court (mais efficace ?) en 3D, Cronenberg (pour un coup de fouet contre la société ?) les frères Dardenne (en route pour une 3ème Palme d’Or ?), Ryan Gsoling (la touche glamour !) en sélection à Un Certain Regard, Bertrand Bonello et son Saint Laurent, Ken Loach et d’autres belles découvertes que nous réjouissons de découvrir.

Reste à découvrir le Jury qui ne sera dévoilé que la semaine prochaine. C’est tout juste si nous savons déjà que Jane Campion dirigera ce jury et que Carole Bouquet en fera partie. Définitivement Cannes et son festival ont encore bien des secrets et de belles surprises à nous révéler, ce n’est pas le regard ténébreux, si singulier et mystérieux deMarcello Mastroniani qui nous dira le contraire.

 L’équipe artsixmic sera sur place lors du Festival afin de partager avec vous cette passion commune pour le cinéma.

Voici la liste complète de la sélection officielle :

Sélection officielle
« Sils Maria » d’Olivier Assayas
« Saint Laurent » de Bertrand Bonello
« Sommeil d’hiver » de Nuri Bilge Ceylan
« Maps to the stars » de David Cronenberg
« Deux jours, une nuit » des frères Dardenne
« Mommy » de Xavier Dolan
« Captive » d’Atom Egoyan
« Adieu au langage » de Jean-Luc Godard
« The search » de Michel Hazanavicius
« The Homesman » de Tommy Lee Jones
« Deux fenêtres » de Naomi
« Mister Turner » de Mike Leigh
« Jimmy’s Hall » de Ken Loach
« La merveille » d’Alice Rohrwacher
« Fox catcher’ de Bennett Miller
« Relatos salvajes » de Damian Szifron
« Leviathan » d’Andrey Zvyagintsev

Un certain regard
« Party Girl » de Marie Amachoukeli, Claire Burger et Samuel Theis
Lisandro Alonson – pas encore de titre
« La chambre bleue » de Matthieu Amalric
« L’incomprise » d’Asia Argento
« Titli » de Kanu Behl
« Eleanor Rigby » de Ned Menson
« Bird people » de Pascale Ferran
« Lost river » de Ryan Gosling
« Amour fou » de Jessica Hausner
« Le pays de Charlie » de Rolf de Heer
« Snow in Paradise » de Andrew Hulme
« A girl off my door » d’Olea Yuliyung
« Xenia » de Panos Koutras
« Run » de Philippe Lacote
« Touriste force majeure » de Ruben Ostlund
« La belle jeunesse » de Jaime Rosales
« Le sel de la terre » de Wim Wenders et Juliano Salgado

Barbara Govaerts pour artsixmic

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Edouard Louis « En finir avec Eddy Bellegueule »

Edouard Louis « En finir avec Eddy Bellegueule »

Élevé dans une famille ouvrière de Picardie, Eddy ne ressemble pas aux autres enfants. Sa manière de se tenir, son élocution, sa délicatesse lui valent de nombreuses humiliations et injures, tant par ses camarades de classe que par son père alcoolique et sa mère revêche. Lui-même finit par s’interroger sur cette homosexualité dont on le taxe avant même qu’il éprouve le moindre désir. Mais la véritable persécution ne vient-elle pas du conditionnement social ? Il parviendra à s’arracher à cette chape écrasante, qui donne au récit une allure zolienne, et à imposer sa personnalité en poursuivant des études de théâtre à Amiens, loin de l’enfer familial et villageois qu’il a connu. Ce texte, psychologiquement frappant, dresse un tableau saisissant d’un monde populaire brutal et sensiblement archaïque. Mais la finesse de l’auteur, par ailleurs sociologue, resitue dans un contexte social le drame familial qui aurait pu devenir une vraie tragédie individuelle. Comment échapper à la détermination ? Comment chaque être peut-il inventer sa liberté ?

En finir avec Eddy Bellegueule vu par Barbara Govaerts pour artsixMic

De cette enfance passée dans un village obscure de Picardie, Eddy Bellegueule ne garde aucun bon souvenir. Cette phrase qui ouvre son roman que l’on apprendra, très vite, être une auto fiction marque de son sceau la dureté et l’âpreté de son histoire. Quand on y pense à deux fois, quelle immense terreur que de n’avoir en tête aucun joli souvenir de son enfance : ferment et socle de la vie.

Car oui, Eddy nous livre ici avec ce premier roman « En finir avec Eddy Bellegueule » la triste réalité d’une première partie de vie passée dans la misère la plus profonde entre principes éducatifs quasi inexistants qui se résument à « devoir être un dur », manque d’hygiène et ostracisme familial, scolaire et social dû à « ses manières ».

Comprenez que ce cher Eddy est homosexuel et dans ce milieu encore plus que dans aucun autre, être « pédé » n’est pas une option. Dans un monde où la réussite sociale se mesure au taux d’alcoolémie et aux coups donnés, l’expression d’une certaine délicatesse (ce qui est le cas d’Eddy qui se définit comme « ayant des manières ») est totalement bannie.

Ce roman, brut et difficile nous place face une réalité « germinalienne » que l’on croirait disparue depuis le siècle dernier. La précision des détails met le doigt sur cette France socialement fragmentée qui n’offre pas les mêmes possibilités que l’on vienne d’un milieu culturel protégé ou du plus bas de l’échelle sociale.

Il est bel et bien question de déterminisme social dans cet ouvrage et Eddy nous livre un exemple fort de courage et de passion. Si ce jeune homme, aujourd’hui âgé de 21 ans, est détruit par la haine qui a empli sa vie jusque là, il donne l’impression de se reconstruire en venant à bout de cet Eddy Bellegueule, victime collatérale d’un milieu social désarmé et laissé pour compte.

En ce sens, son histoire est celle d’une renaissance. Renaissance rendue possible grâce à l’école, au théâtre et à la littérature. Renaissance rendue possible par le rejet de sa condition, par le rejet de suivre cette « reproduction sociale » (la même vie de père en fils et de mère en fille…) et par une volonté sans borne d’accéder à un autre niveau de vie.

« En finir avec Eddy Bellegueule » n’est rien de moins qu’un choc littéraire – salutaire pour son auteur qui se voit déchargé de cette réalité trop lourde qu’il portait seul jusque là, et pour ses lecteurs, mis face à la réalité d’une société qui doit encore évoluer et se soigner.