AMHA (A Mon Humble Avis)

Qui vive ou la difficulté de l’émancipation pour tous

Posted by Barbara GOVAERTS

Qui vive est un exemple, un de plus, qui vient prouver que le cinéma résonne. Ce film est une oeuvre simple, sans prétention aucune, courte (à peine une heure trente), qui propose un scénario simple et sans grand rebondissement. Seulement voilà, il possède sans doute l’essence même du cinéma : cette résonnance et ce passage de témoin entre la réalité (la vie) et la fiction (le cinéma).

Ce qu’il faut que je vous dise déjà c’est qu’un sentiment de quasi douleur m’a étreint pendant le film. Preuve s’il en est de la force du film. Son propos déjà frappe juste : Chérif est un jeune homme de trente ans environ. Il est employé dans un centre commercial où il travaille de façon ponctuelle mais récurrente en tant que vigile – agent de sécurité en fait, il tient à la formulation. En parallèle Chérif passe le concours d’infirmier – pour la quatrième fois et compte bien le décrocher cette fois. Point de précision non négligeable car au coeur du concept du film : Chérif vit chez ses parents dans une cité, en banlieue.

Car oui, c’est bien là le coeur du sujet. La réal pose son regard sur la banlieue, ses habitants, ses réalités. Elle filme la banlieue comme je ne l’avais pas vue depuis longtemps. Elle pose de surcroit la question de l’émancipation réelle lorsqu’on l’on est issu de la banlieue, cette banlieue qui a vite fait de vous isoler, dans vous encastrer et de vous guider tout droit vers des sentiers peu conseillés.

C’est donc là l’histoire qui nous est contée, de façon claire, concise, sans faux semblants et avec vitalité malgré le manque de rebondissements comme je le laissais entendre au début de cet article.

Ce film m’a prise aux tripes : la scène durant laquelle Chérif passe son exam oral m’a franchement touchée. On le sait nous que le garçon est motivé, qu’il le veut ce diplôme qui lui donnera une ouverture sur le monde ou en tout cas lui permettra d’aller de l’avant et de mener une vie qu’il aura choisie. Seulement voilà, le manque de formation est palpable, le manque de confiance en lui surtout. jamais on n’a du encourager ce jeune homme. Il évoque dans une scène le fait qu’il ai tenté médecine mais l’on comprend qu’il a du raccrocher aussitôt, le niveau étant trop élevé. Et ça me touche ! Surtout à l’heure où l’on parle d’égalité pour tous et que l’on est dans un pays censé donner à chacun les mêmes chances. Ce film met dans le mille en évoquant ce sujet, thème central du film.

Reda Kateb, s’il ne trouve pas encore son grand rôle avec ce film (ça viendra, il le mérite) prend vraiment possession de ce personnage et y apporte douceur, tendresse et grande nervosité. Si Reda justement nous raconte cette semaine dans Télérama (il fait même la une du journal) à quel point il a du en refuser des rôles tellement clichés (le mec rebeu dealer, casseur ou terroriste) pour s’ouvrir à des propositions plus riches et diversifiées, il prouve ici que de bons et justes rôles sont taillés à sa mesure. Adèle Exarchopoulos de son côté, (La vie d’Adèle, Palme d’or 2013) doit se sentir bien entourée d’enfants car elle tient ici le rôle d’une éduc / prof de centre aéré (elle était instit’ dans La vie d’Adèle).

En sortant de la salle je me suis fait cette remarque : le film aurait même pu être un court métrage, s’il avait été basé sur la même trame, alors la force qui s’en dégage aurait été la même. Preuve que pour frapper fort, il ne faut pas forcément livrer une oeuvre longue ni même trop fouillée.

La simplicité et la vérité sont souvent clé.

 

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